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MARIAGE FRANCO-MAROCAIN: Le recueil du consentement d’une épouse par procuration n’est pas manifestement incompatible avec l’ordre public international français

Le 07 mai 2020

Le 18 mars 2020, la Cour de cassation a été solliciter pour répondre à une nouvelle question de droit international privée, afférent notamment à mariage  célébré au Maroc hors la présence de l’épouse. 


Les faits étaient les suivants: 

Un français et une marocaine se sont mariés à Fès (MAROC) en 2002 (l’épouse a obtenu la nationalité française en juillet 2014). Le mariage a été transcrit sur les registres de l’état civil consulaire par le consul de France à Fès le 23 mars 2004. De cette union sont nés trois enfants. Après avoir déposé une requête en divorce le 27 janvier 2015, elle a assigné son époux en divorce pour faute le 4 février 2016. Le 30 juin suivant, celui-ci a saisi le tribunal de grande instance d'une demande d'annulation du mariage.


La demande de l’époux est rejetée. Celui-ci fait alors grief à l'arrêt de la cour d’appel de rejeter sa demande d'annulation du mariage célébré  alors « que le juge tranche le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables en recherchant, au besoin d'office, la teneur du droit étranger applicable dans la limite de sa conformité à l'ordre public international français ; que le consentement des époux constitue une règle de fond du mariage ; que la loi étrangère qui prévoit que le mariage peut être célébré en l'absence de l'épouse, sur le fondement d'une simple procuration donnée par celle-ci, est manifestement incompatible avec l'ordre public international français ; qu'en jugeant le contraire, au motif qu'aucune disposition de la loi marocaine ne prévoit la présence obligatoire de la future épouse au mariage, la cour d'appel a violé les articles 3 du code civil et 12 du code de procédure civile, outre les articles 146 et 180 du code civil».

Avant de plus amples développements, il convient de préciser que l’article 25 du code marocain de la famille prévoit que « la femme majeure peut contracter elle-même son mariage ou déléguer à cet effet son père ou l’un de ses proches ». 


Ainsi, la Cour de Cassation a eu à trancher sur la question de savoir si le mariage célébré en l’absence de l’épouse elle-même mais dont le consentement avait été rapporté par un tuteur matrimonial (wali), était conforme à l’ordre public international français.


La Haute Juridiction juge qu’ « en l'absence de contestation touchant à l'intégrité du consentement, la disposition du droit marocain qui autorise le recueil du consentement d'une épouse par une procuration n'est pas manifestement incompatible avec l'ordre public, au sens de l'article 4 (de la convention franco-marocaine du 10 août 1981), dès lors que le droit français n'impose la présence de l'époux à son mariage qu'à l'égard de ses seuls ressortissants ».


La position adoptée par Cour de cassation s’avère en réalité logique au regard du droit applicable aux faits litigieux. 


En effet, il convient de rappeler tout d’abord qu’aux termes de l’article 5 de la Convention franco-marocaine du 10 août 1981 relative au statut des personnes et de la famille et à la coopération judiciaire prévoit que « les conditions du fond du mariage tels que l'âge matrimonial et le consentement de même que les empêchements, notamment ceux résultant des liens de parenté ou d'alliance, sont régies pour chacun des futurs époux par la loi de celui des deux Etats dont il a la nationalité ».


En l’espèce, il s’agissait d’un mariage franco-marocain, entre un français et une marocaine. Ainsi, il en résulte que les conditions de fond du mariage entre un français et une marocaine, sont régies par la loi nationale de chacun des époux (ce principe a d’ailleurs été rappelé dans un arrêt de la Cour de cassation, Chambre civile 1, 16 mars 2016, 15-14.365). 


En outre, la Haute juridiction rappelle dans cet arrêt que l'article 146-1 du code civil n’impose la présence des époux à leur mariage, même célébré à l'étranger, qu’aux seuls ressortissants français. En l’espèce, le mariage a été célébré entre un époux français et une épouse marocaine (la nationalité étant appréciée au jour de la célébration du mariage).   

Enfin, la mise en œuvre de l'exception d'ordre public invoquée par l’époux demandeur doit s’apprécier concrètement. Or, la cour d’appel a jugeait à bon droit que la réalité du consentement de l'épouse au mariage célébré au Maroc n'était pas contestée, et ce d'autant plus que c'était l'époux qui avait invoqué la nullité du mariage, treize après leur union, suite à une demande en divorce pour faute formée par l’épouse. 

Dès lors, la Cour de cassation retient que l'exception d'ordre public international français n'avait pas vocation à être mise en œuvre. Il en résulte que la demande de nullité de mariage devait être rejetée. 


AUTEUR: BOUAGILA Cheinez



POUR EN SAVOIR PLUS: 

Lire l'arrêt complet