DIVORCE POUR DISCORDE AU MAROC PAR DEUX ÉPOUX FRANCO-MAROCAIN RÉSIDANTS EN FRANCE
Le divorce pour discorde, n’est pas un nouveau régime de divorce mis en place par législateur français. Ne vous y méprenez pas. Il s’agit d’un divorce prévu par le code de la famille marocain.
Dans une ère où les personnes sont de plus en plus mobiles, on compte en France, plus d’un million de personnes de nationalité ou d’origine marocaine, et plus de 80 000 personnes de nationalité française résidant au Maroc.
Ce phénomène sociétal n’est pas sans conséquences, et les politiciens en ont bien pris note.
C’est pour régler certaines des questions qui pouvaient en découler, qu’un traité bilatéral franco- marocain en date du 10 août 1981 a été conclu.
Ce traité bilatéral relatif au statut des personnes et de la famille et de la coopération judiciaire, règle certaines interrogations à propos du divorce.
Si le mariage représente un grand pas dans la vie des personnes, la rupture du lien conjugal n’en est pas moins important, puisqu’il permettra d’organiser la séparation du lien matrimonial et toutes les conséquences qui en découlent.
Le fait que la justice française soit lente ne soit plus un secret, souligne l’importance de s’efforcer à diminuer le plus possible les « erreurs de parcours » dans la procédure afin de ne pas retarder le prononcé du jugement de divorce.
Vous êtes franco-marocain et désirez divorcer mais vous ne savez pas vers quel juge vous tourner ?
Vous trouverez ici quelques précisions qui pourront vous être utile afin de ne pas perdre un temps précieux.
L’application de la loi marocaine est permise en vertu de l’article 9 de la convention bilatérale aux termes duquel « la dissolution du mariage est prononcée selon la loi de celui des deux États dont les époux ont tous les deux la nationalité à la date de la présentation de la demande ».
Le code de la famille marocain prévoit plusieurs types de divorces judiciaires et sous contrôle judiciaire.
Le divorce le plus répandu est le divorce judiciaire pour cause de discorde, auquel il s’agira de s’intéresser. La discorde peut se définir comme tout conflit profond et permanent entre les époux qui rend impossible la vie conjugale.
Le prononcé d’un tel divorce est régi en partie par la convention bilatérale franco-marocaine. En effet, ladite convention s’intéresse à la question du juge compétent et à la loi applicable en cas de divorce entre ressortissants marocains ou franco-marocains.
Il ressort de l’article 11, que deux juges pourront être compétents; le juge français ou le juge marocain, puisque celui-ci prévoit que « Au sens de l'alinéa a) de l'article 16 de la Convention d'aide mutuelle judiciaire et d'exequatur des jugements du 5 octobre 1957, la dissolution du mariage peut être prononcée par les juridictions de celui des deux Etats sur le territoire duquel les époux ont leur domicile commun ou avaient leur dernier domicile commun.
Toutefois, dans le cas où les époux ont tous deux la nationalité de l'un des deux Etats, les juridictions de cet Etat peuvent être également compétentes, quel que soit le domicile des époux au moment de l'introduction de l'action judiciaire.
Si une action judiciaire a été introduite devant une juridiction de l'un des deux Etats, et si une nouvelle action entre les mêmes parties et ayant le même objet est portée devant le tribunal de l'autre Etat, la juridiction saisie en second lieu doit surseoir à statuer ».
Cet article 11, qui, il faut le souligner a une valeur supérieure aux lois nationales, règle la question de la litispendance.
Ainsi, dans le cas où un couple de marocains ou de binationaux franco-marocains désirent divorcer, un choix s’offrent alors eux quant au juge compétent: le juge français ou le juge marocain.
Quel juge choisir? Cette question est réellement importante, puisqu’elle aura des conséquences importantes pour la suite de la procédure.
Saisir le juge marocain signifie gain de temps et d’argent puisque les frais de justice seront beaucoup moins cher au Maroc qu’en France. Un gain de temps, puisqu’une procédure de divorce nécessite quelques mois au Maroc, alors qu’en France, la justice est lente, et à ce titre un divorce peut prendre au moins un an.
Mais saisir le juge marocain n’est pas sans risques, puisqu’il est nécessaire d’obtenir l’exécution de cette décision. Néanmoins, à la différence des répudiations, qui ont fait couler beaucoup d’encre chez les auteurs et entraîner beaucoup de migraines chez les juges, le divorce pour discorde est accueilli par les juges français. On note même que, le juge français, lui même a pu en vertu de cette convention bilatérale, prononcer lui même un tel divorce en faisant application du droit marocain.
Choisir le juge pour bien saisir est donc impératif. Pour une illustration: un couple de franco- marocain résidant en France souhaite divorcer. L’épouse saisit le juge marocain en juin 2017 afin qu’il se prononce pour un divorce pour cause de discorde. Alors même que le juge marocain n’a pas rendu de jugement, l’époux saisit le juge français en septembre 2017. Le juge français sera alors contraint de se déclarer incompétent.
Cheinez BOUAGILA
Juriste en Droit international
Master 2 Droit du contentieux international
- mars 2023
- juillet 2022
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