DIFFAMATION ET IRRESPONSABILITÉ PÉNALE :La condition de l’excuse de bonne foi d’une diffamation
La chambre criminelle de la cour de cassation s’est prononcée le 26 novembre 2019 sur la question de l’excuse de bonne foi d’une diffamation.
À titre préliminaire, il convient de donner une courte définition de la diffamation. « Une diffamation est l'allégation ou l'imputation d'un fait qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération d'une personne. Peu importe que le fait en question soit vrai ou faux, mais il doit être suffisamment précis pour faire l'objet, sans difficultés, d'une vérification et d'un débat contradictoire. Il doit être possible de répondre par oui ou non à la question : « Untel a-t-il commis le fait » ?
Il y a diffamation même si l'allégation est faite sous forme déguisée ou dubitative, ou si elle est insinuée. Par exemple, si l'auteur emploie le conditionnel. La diffamation est également caractérisée si l'allégation vise une personne non expressément nommée, mais identifiable (si on donne sa fonction par exemple).
Si l'accusation n'est pas un fait vérifiable, l'allégation relève de l’injure ».
Dans l’affaire jugée par la cour de cassation, les faits étaient les suivants:
Un courriel intitulé « agression sexuelle, harcèlement sexuel et moral » a été adressée par une ancienne salariée d’une association créée pour développer l’enseignement confessionnel, comptant plusieurs établissements scolaires sous contrat, au directeur général de l’association, à l’inspecteur du travail, au vice-président, au directeur spirituel de l’association, ainsi qu’à plusieurs autres personnes.
Le directeur général de l’association fait citer l’ancienne salariée du chef de diffamation publique envers un particulier devant le tribunal correctionnel. La juridiction la déclare coupable.
L’auteure du courriel interjette appel du jugement. La cour d’appel confirme le jugement rendu aux motifs que s’il existe des éléments permettant d’établir la réalité d’un harcèlement moral, voire sexuel dans la perception qu’elle a pu en avoir, rien ne permet de prouver l’existence de l’agression sexuelle pour laquelle elle n’a pas déposé plainte et ne peut produire ni certificat médical ni attestations de personnes qui auraient pu avoir connaissance, si ce n’est des faits, au moins du désarroi de la victime.
L’auteure forme alors un pourvoi en cassation contre cet arrêt. La cour de cassation retient que la cour d’appel a justifié sa décision.
En effet, la cour de cassation juge pour rejeter le pourvoi que « la personne poursuivie du chef de diffamation après avoir révélé des faits de harcèlement sexuel ou moral dont elle s’estime victime peut s’exonérer de sa responsabilité pénale, en application de l’article 122-4 du code pénal, lorsqu’elle a dénoncé ces agissements, dans les conditions prévues aux articles L. 1152-2, L. 1153-3 et L. 4131-1, alinéa 1er, du code du travail, auprès de son employeur ou des organes chargés de veiller à l’application des dispositions dudit code ».
En outre, la cour de cassation rappelle que pour bénéficier de la cause d’irresponsabilité pénale, la personne poursuivie de ce chef doit avoir réservé la relation de tels agissements à son employeur ou à des organes chargés de veiller à l’application des dispositions du code du travail. Or en l’espèce, la requérante a adressé son courriel à des personnes ne disposant pas de l’une de ces qualités.
Enfin, la cour de cassation retient que la cour d’appel a déduit, à juste titre, que la requérante ne pouvait bénéficier de l’excuse de bonne foi puisque les propos litigieux ne disposant pas d’une base factuelle suffisante.
AUTEUR: BOUAGILA Cheinez
POUR EN SAVOIR PLUS:
-Consulter l’arrêt: Cass. crim., 26 nov. 2019, n° 19-80360
-Sur la diffamation: https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F32079
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