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DÉPLACEMENT ILLICITE D’ENFANT: Le critère du risque grave

Le 13 mai 2020

Avant tout propos, il convient de rappeler qu’en matière de déplacement illicite d’enfant, le retour de l’enfant déplacé illicitement constitue le principe. Cependant des circonstances peuvent faire obstacle au retour de l’enfant dans le pays de résidence habituelle. 


Tout au long de l’année 2019, la Cour de cassation a eu l’occasion de venir préciser sa jurisprudence quant à cette question. 


Malgré une prise de conscience de cette réalité de la part des États, qui se manifeste à travers l’adoption de traités notamment la Convention de La Haye, de telles situations  demeurent très présentes. En effet, ces dernières années, il est possible de noter une recrudescence des enlèvements internationaux d’enfant.


Ainsi, le 27 juin 2019, la Cour de cassation a jugé d’une affaire dont les faits étaient les suivants: 


Un enfant est né d’un couple de deux nationaux français. Le couple et l’enfant établissent leur résidence au Luxembourg. En 2015, les deux parents se séparent. Par la suite (en 2018), la mère regagne la France avec son enfant. Le père se manifeste alors et saisi d’une part l’autorité centrale du Luxembourg sur le fondement de la Convention de La Haye du 25 octobre 1980. D’autre part, ce dernier obtient du juge luxembourgeois la garde définitive de l’enfant.


En outre, le procureur de la République a assignée sur ce même fondement la mère devant le juge aux affaires familiales afin que soit ordonné le retour immédiat de l’enfant dans l’État de sa résidence habituelle. 

S’agissant de la procédure devant les juridictions françaises: 


C’est en vertu de l’article 13b de la Convention de La Haye que les juges du fond s’opposent au retour de l’enfant au Luxembourg, pays de résidence habituelle. En effet, les juges français ont constaté l’existence d’un risque grave qui fait dès lors exception au principe du retour immédiat de l’enfant. 


En l’espèce, les juges soutiennent que le risque grave est constituée au regard du caractère obsessionnel du père, des actes de maltraitances, des idées suicidaires exprimées par l'enfant en cas de retour chez celui-ci.


Le père forme alors un pourvoi en cassation contre l’arrêt de la cour d’appel.


Il soutient « que lorsqu’en cas de déplacement ou de non-retour illicites d’un enfant, les juridictions de l’Etat membre dans lequel l’enfant avait sa résidence habituelle immédiatement avant son déplacement ou son non-retour illicites et qui conservent leur compétence pour statuer au fond sur la responsabilité parentale, ont statué sur la garde de l’enfant et rendu une décision impliquant le retour de l’enfant, les juridictions de l’Etat de refuge ne peuvent refuser d’ordonner le retour de l’enfant, sans tenir compte des motifs retenus par la juridiction de l’Etat membre d’origine et de l’appréciation qui a été faite par cette juridiction des éléments de preuve, également produits devant la juridiction de l’Etat membre de refuge, pour décider du retour de l’enfant »

 

La Haute Juridiction rejette le pourvoi et confirme ainsi l’existence d’un risque grave de danger physique et psychique en cas de retour de l’enfant au Luxembourg. Dès lors, il existe un obstacle au retour de l’enfant dans l’État de résidence habituelle. 


En outre, la Cour de cassation retient que la cour d’appel n’était pas tenu ni par les motifs de la décision luxembourgeoise ni par l'appréciation par celle-ci des éléments de preuve produits devant elle. Par cette solution, le juge de cassation vient préciser de façon bienvenue la portée de l’article 13 alinéa 3 de la Convention de La Haye qui dispose que « les autorités judiciaires ou administratives doivent tenir compte des informations fournies par l'Autorité centrale ou toute autre autorité compétente de l'Etat de la résidence habituelle de l'enfant sur sa situation sociale ». Il ne s’agit donc pas d’une obligation mais bel et bien d’une faculté.


Pour en savoir plus: 

Lire l’arrêt du 27 juin 2019 (19-14.464): https://www.courdecassation.fr/jurisprudence_2/arrets_publies_2986/premiere_chambre_civile_3169/2019_9122/juin_9326/727_27_43045.html

AUTEUR: BOUAGILA Cheinez