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Couple de même sexe: Adoption plénière de l’enfant en dépit du refus opposé par la mère biologique

Le 20 avril 2020

Dans un arrêt rendu le 14 octobre 2019, le Tribunal de grande instance de Lille a été saisi d’une affaire mettant en cause un couple homoparentale en cours d’instance de divorce au sein duquel deux enfants sont nés de l’une des épouses. 


Dans cette affaire, deux femmes se sont passées en 2011. Un premier enfant né au sein du couple en 2013, les deux femmes deviennent alors mères (légale pour l’une et sociale pour l’autre). Le couple se marie en 2014, le premier enfant est adopté par la mère sociale en 2015.  

En 2017, un second enfant né de la même mère. Cependant, une requête en divorce est déposée en octobre 2018 alors qu’une requête en adoption plénière est introduite en parallèle par la mère sociale en janvier 2019. Cette fois-ci, la mère biologique refuse de consentir à l’adoption de son enfant. 


Par ce jugement, le tribunal de grande instance de Lille prononce au visa de l’article 371-4 du code civil l'adoption plénière en dépit même du refus explicite de la mère biologique.


Cet article dispose que: « L'enfant a le droit d'entretenir des relations personnelles avec ses ascendants. Seul l'intérêt de l'enfant peut faire obstacle à l'exercice de ce droit. 

Si tel est l'intérêt de l'enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l'enfant et un tiers, parent ou non, en particulier lorsque ce tiers a résidé de manière stable avec lui et l'un de ses parents, a pourvu à son éducation, à son entretien ou à son installation, et a noué avec lui des liens affectifs durables ».

Ce jugement vient offrir une solution au contentieux important né suite à  l’adoption de la loi du 17 mai 2013, ouvrant le mariage et l’adoption aux couples de même sexe. Depuis lors, de nombreuses femmes se retrouvent dans une situation similaire, où elles n’ont pas eu le temps d’adopter l’enfant qu’elles ont élevées avec leur conjointe avant qu’une requête en divorce ne survienne. 


Lorsque la séparation du couple intervient avant que le consentement de la mère biologique ait pu être donné devant notaire, la mère sociale se trouve dans une situation difficile. Afin de maintenir le lien avec l’enfant, celle-ci se voit alors contrainte de solliciter l'octroi d'un simple droit de visite et d'hébergement sur le fondement de l'art. 371-4 c. civ.


Ce droit de visite et d’hébergement n’est pas satisfaisant puisqu’il ne confère aucune autorité parentale à la mère sociale pas plus qu’il n’établit de lien de filiation avec l’enfant. 

La requérante dans l’affaire commentée se trouvait dans cette situation.


Dans cette affaire, deux questions se sont posées au juge: 

-L’adoption de l'enfant du conjoint est-elle possible alors que les parties sont séparées et sont en instance de divorce?

Le juge répond par l’affirmative aux motifs qu’en l’absence de jugement de divorce la qualité de conjoint posée à l’article 345-1 du code civil est remplie. 


-La seconde question porte sur le fait de savoir si le refus explicite opposé par la mère biologique pouvait être qualifié d’abusif? 

Afin que le refus soit qualifier d’abusif, le tribunal rappelle que l’article 348-6 du code civil exige que les parents se soient « désintéressés de l’enfant au risque d’en compromettre la santé ou la moralité ». 

Le juge vient écarté cette hypothèse en soutenant cependant que le refus opposé par la mère biologique doit être qualifié d’abusif « car il est contraire à l'intérêt de l'enfant en ce qu'il a pour effet de nier le projet parental dont il est le fruit ».


Ainsi, l’adoption plénière est prononcée au profit de la mère sociale.