Bail commercial : Précisions sur la clause d’indexation
À titre préliminaire, il convient de rappeler succinctement ce qu’est une clause d’indexation. Dans un contrat de bail commercial, une telle clause permet au bailleur de se protéger contre une dévalorisation de la valeur de son bien en raison notamment d’une inflation. Insérer une telle clause au contrat permet de réévaluer le montant du loyer sur la base d’un indice de référence.
La clause d’indexation fait l’objet de dispositions légales au sein du code monétaire et financier.
Le 6 février 2020, la troisième chambre civile de la Cour de Cassation s’est prononcé sur une affaire mettant en cause une telle clause.
Les faits d’espèces étaient les suivants:
La société FDL1 a donné à bail commercial à la société Speedy France un bâtiment à usage de bureaux à compter du 15 janvier 2008 pour une durée de neuf années et moyennant un loyer annuel de 220 000 euros hors taxes.
La société Speedy France se prévalait du caractère illicite de la clause d'indexation insérée au bail, la société locataire a saisi le tribunal aux fins de voir déclarer cette clause réputée non écrite et condamner la société bailleresse à restituer des sommes versées au titre de l’indexation.
Dans la présente affaire, la clause prévoyait une indexation pour la première fois le 15 janvier 2009 par variation de l'indice INSEE du 4ème trimestre 2006 à l'indice INSEE du 4ème trimestre 2008.
Il en résulte ainsi que la durée de variation de l’indice prise en compte était de deux ans, alors que la durée s’écoulant entre la fixation des deux montants de loyers était d’un an.
Pour ces motifs, les juges du fond ont réputé la clause non écrite en son entier sur le fondement de l’article L.112-1 du code monétaire et financier.
Aux termes de cet article L. 112-1 « est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, tel que le bail commercial, prévoyant la prise en compte, dans l'entier déroulement du contrat, d'une période de variation indiciaire supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision. »
La Cour de cassation casse l’arrêt de la cour d’appel en soutenant qu’:
« En application de ce texte, est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, tel que le bail commercial, prévoyant la prise en compte, dans l'entier déroulement du contrat, d'une période de variation indiciaire supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision.
Pour la déclarer non écrite en son entier, l'arrêt retient que la clause d'indexation, applicable à la première révision, conduit à la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée écoulée depuis la prise d'effet du bail, de sorte qu'elle n'est pas conforme aux dispositions d'ordre public de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier.
En statuant ainsi, alors que seule la stipulation qui crée la distorsion prohibée est réputée non écrite, la cour d'appel, qui a constaté que la clause n'engendrait une telle distorsion que lors de la première révision, a violé le texte susvisé. »
Cette arrêt qui vient préciser les limites à la clause d’indexation s’insère dans la droite ligne de la jurisprudence antérieure de la Cour de cassation.
AUTEUR: BOUAGILA Cheinez- Juriste en droit international
En savoir plus:
L’article L.112-1 du code monétaire et financier prévoit que:
« Sous réserve des dispositions du premier alinéa de l'article L. 112-2 et des articles L. 112-3, L. 112-3-1 et L. 112-4, l'indexation automatique des prix de biens ou de services est interdite.
Est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment des baux et locations de toute nature, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision.
Est interdite toute clause d'une convention portant sur un local d'habitation prévoyant une indexation fondée sur l'indice " loyers et charges " servant à la détermination des indices généraux des prix de détail. Il en est de même de toute clause prévoyant une indexation fondée sur le taux des majorations légales fixées en application de la loi n° 48-1360 du 1er septembre 1948, à moins que le montant initial n'ait lui-même été fixé conformément aux dispositions de ladite loi et des textes pris pour son application ».
Lire l’arrêt en entier:
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