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L’impossibilité pour le père biologique d’établir la filiation de son enfant né sous X conforme à la Constitution

Le 07 avril 2020
Dans une décision n° 2019-826 QPC, la question de la conformité à la Constitution des droits du père d'un enfant né sous X a été soulevée.

Le 7 février 2020, le Conseil constitutionnel a dû connaitre d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur les droits du père d’établir la filiation d’un enfant né sous X. 


La question déférée devant le Conseil constitutionnel portait précisément sur la conformité de l’article 351 et 352 du code civil à la Constitution. 


L’article 351 du code civil dispose que: 

«  Le placement en vue de l'adoption est réalisé par la remise effective aux futurs adoptants d'un enfant pour lequel il a été valablement et définitivement consenti à l'adoption, d'un pupille de l'Etat ou d'un enfant déclaré abandonné par décision judiciaire.

Lorsque la filiation de l'enfant n'est pas établie, il ne peut y avoir de placement en vue de l'adoption pendant un délai de deux mois à compter du recueil de l'enfant.

Le placement ne peut avoir lieu lorsque les parents ont demandé la restitution de l'enfant tant qu'il n'a pas été statué sur le bien-fondé de cette demande à la requête de la partie la plus diligente ».


L’article 352 du code civil prévoit que: 

« Le placement en vue de l'adoption met obstacle à toute restitution de l'enfant à sa famille d'origine. Il fait échec à toute déclaration de filiation et à toute reconnaissance.

Si le placement en vue de l'adoption cesse ou si le tribunal a refusé de prononcer l'adoption, les effets de ce placement sont rétroactivement résolus ».

À titre préliminaire, il faut rappeler que lorsque la mère demande le secret de son accouchement, l’enfant alors né n’est pas considéré comme né de telle femme puisque officiellement cette dernière n’a pas accouché. 


Mais quid du père? Le père peut procéder à la reconnaissance de l’enfant avant sa naissance et jusqu’à son éventuel placement. Néanmoins, la situation est plus difficile lorsque les dates et lieu de naissance de l’enfant ne sont pas connus. 


L’article 62-1 du code civil prévoit alors la possibilité pour le père de naissance à informer le procureur de la République afin que celui-ci procède à la recherche des date et lieu d’établissement de l’acte de naissance de l’enfant.

La reconnaissance de l’enfant avant son placement en vue de son adoption deux mois après son recueil par l’Aide sociale à l’enfance, fait alors échec à son adoption et, ce même si l’enfant n’est précisément identifié qu’après son placement.


Les délais sont donc extrêmement courts, d’autant plus qu’une action ou une inaction dans ces délais sera lourde de conséquences tant pour l’enfant que pour le père. En effet, il ressort de l’article 352 du code civil que le placement fait échec à toute déclaration de filiation et à toute reconnaissance.


Dans l’affaire litigieuse, le requérant soutenait que les articles 351 et 352 du code civil  privilégieraient la filiation adoptive au détriment de la filiation biologique en méconnaissance de l’intérêt supérieur de l’enfant. 

Ce dernier arguait également de la méconnaissance par lesdits articles du principe d’égalité devant la loi aux motifs qu’ils soumettaient la mère et le père biologiques aux mêmes délais alors que seule la mère avait été pleinement informée des conséquences d’un tel accouchement. 


La question prioritaire de constitutionnalité portait donc sur les mots « deux mois » (figurant au deuxième alinéa de l'article 351 du code civil) et sur les mots « et à toute reconnaissance » (figurant à la deuxième phrase du premier alinéa de l'article 352 du même code).


Nonobstant les arguments forts soulevés par le requérant, le Conseil constitutionnel déclara les textes conformes à la Constitution. À cet effet, il soutenu que le législateur avait entendu par ces dispositions concilier l’intérêt des parents biologique à disposer d’un délai raisonnable pour reconnaître l’enfant et en obtenir la restitution et celui de l’enfant à ce que son adoption intervienne dans un délai qui ne soit pas de nature à compromettre son développement et à lui garantir un environnement familial stable. 


Pour en savoir plus:


Auteur: BOUAGILA Cheinez - Juriste en Droit international